MODE D’EMPLOI DES INHIBITEURS DE PROTÉASE

 

Jusqu’à la fin de l’année 1995, parmi les traitements officiels du SIDA, seule la prophylaxie de la pneumocystose et de la toxoplasmose (notamment par le Bactrim®) offrait des résultats concluants. Depuis, la publication des premiers résultats obtenus avec les trithérapies (AZT + (ddc ou 3TC) + ritonavir) permet d’espérer une plus grande efficacité des traitements officiels. Mais il importe de ne pas perdre encore de temps : il faut envisager dès maintenant d’expérimenter des polythérapies associant plus de trois médicaments, en incluant aussi des traitements complémentaires (comme par exemple le Guronsan®, la vitamine C, etc.).

Ces trithérapies associent actuellement un inhibiteur de protéase (lP) à deux inhibiteurs de la reverse transcriptase, une autre enzyme du virus VIH (IRT). Des études sont en cours concernant des quadrithérapies associant deux lP.

Il semblerait qu’actuellement la trithérapie la plus efficace, et comportant le moins d’effet secondaire, soit celle qui associe : 3TC (Epivir®) + D4T (Zerit®) + indinavir (Crixivan®) comme lP. D’autres trithérapies utilisent d’autres lP comme le saquinavir (lnvirase®) ou le ritonavir (Norvir®) et d’autres IRT comme l’AZT (Rétrovir®), le ddl (Videx®) et le ddc (Hivid®). En raison de leurs effets secondaires, il semble préférable d’éviter le ddl, le ddc et surtout l’AZT (de plus, des résistances à l’AZT apparaissent fréquemment et même chez des personnes n’ayant reçu aucun traitement antérieurement) et d’avoir recours pour les IRT au D4T et au 3TC. D’autres lP sont déjà à l’étude ; notamment le nelfinavir (Viracept®) qui serait efficace même quand le VIH devient résistant aux autres lP.

Si, actuellement, il apparaît qu’il faille débuter d’emblée une trithérapie (l’utilisation préalable d’une bithérapie risque de faire apparaître des résistances ; c’est d’ailleurs la raison pour laquelle il est conseillé, dans ce cas, que l’un des IRT soit remplacé par une nouvelle molécule de cette famille), il n’est pas aisé de déterminer le moment opportun pour débuter une trithérapie, dans la mesure où, actuellement, aucun marqueur biologique n’est fiable à 100% et qu’aucune étude n’a pu déterminer des seuils précis pour ces marqueurs, à partir desquels ces traitements seraient conseillés. Ce que l’on peut avancer avec certitude, c’est que l’indication de ces traitements est conseillée dans les situations suivantes : avant tout, les personnes ayant fait des infections opportunistes ; en cas de majoration importante de la charge virale ; en cas de charge supérieure à 100 000 copies/ml ; en cas de diminution importante des lymphocytes T4, ou de T4 inférieurs à 200/mm3 (ou inférieur à 15%) constatées sur deux examens. Pour les autres cas de figure, la décision de débuter ce type de traitement doit être prise en fonction de chaque patient.

Notre propos sera de préciser les modalités pratiques d’utilisation des IP et les précautions d’emploi de ces lP (nous avons souligné les effets secondaires les plus importants et/ou les plus fréquents). Les informations que nous donnons ne sont pas exhaustives dans la mesure où l’étude des lP est encore récente, et, donc, les patients ne doivent pas hésiter à interroger le médecin prescripteur, notamment en ce qui concerne les interactions médicamenteuses *.

 

INDINAVIR

 

  • Se prend à jeun avec de l’eau 1 heure avant les repas ou 2 heures après les repas.
  • Boire au minimum 1,5 litre/jour.
  • Posologie : 2 400 mg/24h à prendre en 3 prises.
  • Réduction de posologie à 1 800 mg/24h en cas d’insuffisance hépatique modérée.
  • Contre-indications : insuffisance hépatique majeure (TP<50%), hypersensibilité, allaitement, grossesse, absence de contraception.
  • Associations médicamenteuses formellement contre-indiquées ** : astémizole, cisapride, midazolam, terfénadine, triazolam.
  • Associations déconseillées : rifampicine, autres lP.
  • Associations nécessitant de prendre des précautions : ddl (à prendre 1h avant les repas et l’indinavir 2h après les repas), kétonazole (réduire la posologie de l’indinavir), rifabutine, clarithromycine, fluconazole, isoniazide, Sulfaméthoxazole/triméthoprime, AZT, D4T, jus de pamplemousse.
  • Précautions d’emploi : antécédent de lithiase urinaire, insuffisance hépatique.
  • Effets secondaires : généraux (asthénie), dermatologiques (éruption cutanée, prurit), digestifs (douleur abdominale, diarrhée), neuropsychiques (céphalée, insomnie), stomatologiques (sécheresse de la bouche), urinaires (douleur lombaire, hématurie, lithiase des voies urinaires), biologiques (élévation de la bilirubine indirecte, non conjuguée, élévation des transaminases, protéinurie).

 

SAQUINAVIR

 

  • Se prend 2h après les repas.
  • Posologie : 1 800 mg/24h à prendre en 3 prises.
  • Contre-indications : idem indinavir + diarrhée chronique, malabsorption (notamment hypoalbuminémie), certains troubles hématologiques.
  • Associations médicamenteuses déconseillées : inducteurs du métabolisme hépatique (carbamazépine, phénytoïne, rifabutine), inhibiteurs de l’isoenzyme CYP 3A4 (fluconazole, itraconazole, kétoconazole, miconazole), antagonistes calciques (clindamycine, nifédipine, terfénadine), rifampicine, autres lP, jus de pamplemousse.
  • Effets secondaires : généraux (anorexie, asthénie), dermatologiques (éruption cutanée), digestifs (nauséediarrhée, douleur abdominale, pancréatite), neurologiques (neuropathie périphérique), stomatologiques (ulcération buccale), biologiques (élévation des CPK, des transaminases, baisse de la glycémie).

 

RITONAVIR

 

  • Médicament à conserver entre + 2°C et + 8°C.
  • Se prend au cours des repas.
  • Posologie : 1 200 mg/24h à prendre en 2 prises (le traitement doit être débuté progressivement : 600 mg/24h puis 800 mg/24h à J2 et J3 puis 1 000 mg/24h à J4).
  • Contre-indications : idem indinavir.
  • Associations médicamenteuses formellement contre-indiquées **, y compris dans le mois précédant le début du traitement) : alprazolam, amiodarone, astémizole, bépridil, bupropion, cisapride, clorazépate, clozapine, dextro-propoxyphéne, diazepam, encaïnamide, flécaïnide, mépérinide, midazolam, péthidine, piroxicam, propafénone, quinidine, terfénadine, triazolam, zolpidem.
  • Associations déconseillées ** : macrolides (clarithromycine, dirithromycine, érythromycine, roxithromycine), carbamazépine, amitriptyline, désipramine, fluoxétine, imipramine, nortriptyline, paroxétine, sertraline, loratidine, warfarine, contraceptifs oraux, tolbutamine, amlodipine, diltiazem, felopidine, isadipine, lacidipine, nicardipine, nifédipine, nitrendipine, vérapramil, autres lP, halopéridol, rispéridone, théoridazine, dexaméthasone, prednisolone.
  • Effets secondaires : généraux (anorexie, asthénie, fièvre), dermatologiques (érythème prurit), digestifs (diarrhée, douleur abdominale, nauséevomissement), neuropsychiques (anxiété, insomnieneuropathie périphériqueparesthésie), stomatologiques (altération du goût, irritation de la gorge), biologiques (leucopénie, neutropénie, hyperéosinophilie, augmentation du Temps de Coagulation, élévation des gamma-GT, des transaminases, des triglycérides, des CPK.

 

Drs J. Avicenne
Conseillers médicaux de POSITIFS

* Les médicaments ont été cités sous leur dénomination chimique (DCI). Nous indiquons les noms de la plupart des spécialités pharmaceutiques sous lesquelles ils sont commercialisés en France :

D.C.I. Spécialités pharmaceutiques
alprazolam Xanax®
amiodarone Cordarone®, Corbionax®
amitriptyline Elavil®, Laroxyl®
amlodipine Amlor®
astémizole Hismanal®
bépridil Cordium®
bupropion Wellbutra® (USA) *** (amphébutamone : dérivé amphétaminique)
carbamazépine Tegretol®
cisapride Prépulsid®
clarithromycine Zeclar®, Naxy®
clindamycine Dalacine®
clorazépate Tranxène®, Noctran®
clozapine Léponex®
désipramine Pertofran®
dexaméthasone Decadron®, Dectancyl®, Soludécadron®, etc
dextro-propoxyphéne Antalvic®, Di-antalvic®, Propofan®
diazépam Valium®, Novazam®
diltiazem Bi-Tildiem®, Deltazen®, Diacor®, Difrène®
dirithromycine Dynabac®
encaïnamide Encaïnide ***
érythromycine Abboticine®, Egéry®. Ery 500®, Erythrocine®, Erythrogram®, Propiocine®, etc
félopidine Flodil®
flécaïnanide Flécaïne®
fluconazole Triflucan®
fluoxétine Prozac®
halopéridol Haldol®, Vésadol®
imipramine Tofranil®
isradipine lcaz®
isoniazide Rimifon®, Dexambutol-INH®, Rifater®, Rifinah®
itraconazol Sporanox®
kétoconazole Nizoral®, Kétoderm®
lacidipine Caldine®
loratidine Clarityne®, Clarinase®
mépérinide Mépéridine (similaire à péthidine) ***
miconazole Britane®, Daktarin®, Daktacort®
midazolam Hypnovel®
nicardipine Loxen®
nifédipine Adalate®, Nifélate®, Ténordate®
nitrendipine Baypress®, Nidrel®
nortriptyline Motival®
paroxétine Déroxa®
péthidine Dolosal®
phénytoïne Di-hydan®, Pyorésol®
piroxicam Brexin®, Feldène®, Geldène®, Olcam®
prednisolone Hydrocortancyl®, Solupred®, Cortancyl®, etc
propafénone Rythmol®
quinidine Cardioquine®, Longacor®, Natisédine®, Quinidurule®, Quinimax®
rifabutine Ansatipine®
rifampicine Rifadine® Rimactan®, Rifater®, Rifinah®
rispéridone Risperdal®
roxithromycine Claramid®, Rulid®
sertraline Zoloft® (sertralin)
sulfaméthoxazole/ Baktékod®, Bactrim®, Cotrimazol®,
triméthoprime Eusaprim®, etc
terfénadine Teldane®
thioridazine Melleril®
tolbutamine Dolipol®
triazolam Halcion®
vérapamil Arpamyl®, lsoptine®. Novapamyl®, Vératrol®
warfarine Coumadine®
zolpidem lvadal®, Stilnox®

** II s’agit notamment d’antihistaminiques, d’antidépresseurs et d’antibiotiques.
*** Spécialité pharmaceutique qui n’est pas ou n’est plus commercialisée en France.