L’intérêt pour la proteine Tat du virus HIV dans le cadre d’un vaccin thérapeutique remonte aux travaux du Dr Zagury en 1998(Zagury, J.F. et al. Antibodies to the HIV-1 Tat protein correlated with nonprogression to AIDS: a rationale for the use of Tat toxoid as an HIV-1 vaccine. J. Hum. Virol. 4, 282−292 )

Un chercheur du CNRS Erwann Loret a poursuivi et développé les recherches sur la proteine Tat et déposé un brevet(Vaccin anti-vih-1 comprenant tout ou partie de la proteine tat de vih-1 CA 2370563 C) le 12 Avril 2000. Il est regrettable qu’un brevet potentiellement aussi prometteur pour les patients et les finances publiques n’ait pas été développé en urgence par le CNRS ou autres organismes publics et vendu à la startup Biosantech

Le vaccin anti-VIH développé par Biosantech cible Tat, une protéine produite par les cellules infectées par le virus VIH. Tat est une protéine exprimée aux premiers stades de l’infection. Les traitements antirétroviraux ne bloquent pas la sécrétion de Tat. Un variant de la protéine Tat, appelé Tat OYI, a été isolé chez une patiente gabonaise porteuse du virus VIH mais en bonne santé. Tat OYI possède des mutations qui n’avaient pas été observées dans d’autres variants ; il permettrait une bonne réponse immunitaire, d’où l’idée de l’utiliser pour un vaccin.

Différentes approches ont été utilisées pour obtenir un vaccin contre Tat et l’essai clinique de Biosantech utilise le variant Tat OYI. Des expériences chez des lapins immunisés avec Tat OYI ont montré la production d’anticorps reconnaissant non seulement Tat OYI mais aussi des variants de Tat d’autres sous-types de VIH. De plus, un vaccin Tat OYI a permis une protection chez des macaques.

 

Le vaccin Tat OYI rend le virus indétectable chez trois patients

Après avoir été testé chez l’animal, le vaccin a commencé à être évalué chez l’Homme en 2013(après accord de l’Agence Nationale de Recherche sur le Sida). L’essai clinique a été mené à Marseille sous la direction d’Isabelle Ravaux. 48 patients infectés depuis plus de dix ans ont participé. Ils ont été répartis en quatre groupes : un groupe placebo (12 patients) et trois groupes testant différentes doses de vaccin. La trithérapie a été interrompue pour voir la réaction du virus.

Les résultats présentés à la presse par Biosantech et le chercheur Erwann Loret indiquent que le candidat vaccin a permis d’atteindre un niveau indétectable du virus chez des patients séropositifs. D’après le chercheur, « on fait gagner 70 ans de trithérapie aux patients ». Les résultats devraient être publiés prochainement dans la revue Retrovirology. D’après le communiqué de presse de l’entreprise, chez trois patients, l’ADN viral était indétectable 24 mois après l’injection avec 33 µg de vaccin. Le but poursuivi est d’éliminer les cellules réservoirs et donc de traiter la maladie en combinant le vaccin à la trithérapie.

Les medias et les officiels du Sida, le directeur de l’ANRS, Jean –François Delfraissy notamment, hésitent entre une une avancée scientifique majeure et une simple opération de communication destinée à rassurer des investisseurs ou un industriel potentiel ? La start-up qui a levé des fonds par Internet avec le crowdfunding serait en recherche de partenaires, comme l’expliquait L’Usine Nouvelle en novembre dernier. L’entreprise a pour projet de réaliser un essai de plus grande envergure en 2016 pour demander une autorisation de mise sur le marché en 2018.

Ce qui est le plus choquant est la réaction de colère du Directeur de l’ANRS qui au lieu de mettre en doute les résultats annoncés par un chercheur brillant et reconnu du CNRS et exiger une publication dans une revue à comité de lecture( ce qui n’est nullement un gage d’honnêteté) aurait du  soutenir et financer en urgence et avec enthousiame, un essai de confirmation de la découverte. Ce comportement est malheureusement un attitude courante dans le monde de la recherche où des chercheurs talentueux sont freinés par des directions formatées sans audace.

Soulignons enfin que si cette découverte était avérée, tout le petit monde qui vit du Sida (ANRS, associations, ONUSIDA) fera de la résistance pour ne pas  disparaitre.

Publication de  Erwann Loret sur son vaccin: Retrovirology 2016 13:35

 

Dr Adrien Caprani, Directeur de Recherche honoraire au CNRS,  ancien membre de la Commission « Pharmacologie et Thérapeutique expérimentale « du Comité national du CNRS